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Kermesse à Jambes - Albert DANDOY (Namur 1885 - 1977)

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Kerlesse à Jambes - Albert Dandoy
Albert DANDOY - Kermesse à Jambes
Huile sur toile

Il n'aura donc pas plu pour le Corso jambois de 1957 ! D'après ce témoignage, ce fut une belle journée de fête. Albert Dandoy a représenté, dans la partie gauche d'un avant-plan ombragé, un groupe folklorique habillé à la mode du 17ème siècle, accompagné d'un chien. Il suit des enfants porteurs de bannières qui se dirigent vers un groupe de gilles situé à droite, dont les coiffes constituent un amas de touches lumineuses qui rejoignent le plan moyen baigné de soleil. On y distingue des badauds, esquissés en quelques touches, qui regardent la scène. Le reste de la foule n'est que taches de couleurs. 

De cette multitude émergent, dans des tons or, un carrousel souligné de bleu à gauche et la « Friture du Progrès » au pare-soleil rouge vif, à droite. Une baraque plus basse, tendue de vert, la jouxte. En retrait de cette liesse, la maison communale à droite et une discrète balançoire à gauche ferment la composition. L'exécution de cette peinture -probablement réalisée sur place- est rapide, il n'y a pas de minutie mais l'œuvre est lisible, tout y est, on sent la fête. Dandoy savait rendre les ambiances, les atmosphères, qu'elles fussent festives, de marché ou tout simplement de rue, voire paysagères. Il fut souvent comme ici, surtout dans le groupe des gilles, un héritier des impressionnistes, qui procédaient par petites touches rapides pour rendre la lumière, ses jeux et l'ambiance qu'elle génère.Albert Dandoy est, dans cette œuvre, en pleine maîtrise de son art ce qui, vu son talent naturel favorisé par le milieu familial et bonifié par des années de travail, n'est pas surprenant.

Son grand-père Jean-Baptiste (Flawinne, 1799 – Namur, 1873) fils d'ouvrier journalier, profita de son service militaire effectué à Leyde (Hollande) de 1820 à 1826, pour s'initier au dessin et à la peinture. Après s'être ensuite perfectionné à Paris, il s'établit à Namur comme peintre-décorateur, tout en consacrant ses loisirs à réaliser des portraits, des compositions de fruits et de fleurs. Il restaurait aussi des tableaux. Ses affaires prospérant, il constitua une importante collection de peintures qui fut mise en vente à sa mort. La catalogue reprenait 156 lots.

Cet environnement d'œuvres d'art influença sûrement ses deux enfants. Si Ernest, le second, reprit l'entreprise familiale, Auguste (Namur, 1839 – 1893), le père d'Albert, continua comme artiste-peintre. Elève à l'Académie de Namur de 1854 à 1857, il s'y distingue comme un des meilleurs élèves. Epargné par le tirage au sort, il échappe au service militaire et en profite pour partir se perfectionner à l'Académie de Bruxelles où il est l'élève d'un autre Namurois, Joseph Quinaux (Namur, 1822 – Bruxelles, 1895), dont la Ville possède encore trois œuvres. De retour à Namur, il y exerce son art et devient professeur à l'Académie à partir de 1872. Parallèlement, il prend une part active à l'organisation des expositions triennales des Beaux-arts, dont la première édition eut lieu en 1871. Il y expose à plusieurs reprises et vend des œuvres à la Ville, à la Province et à des particuliers. Malheureusement il mourra prématurément à l'âge de 54 ans, laissant cinq fils orphelins.

Albert, le plus jeune, n'a que 8 ans à la mort de son papa et ne l'aura donc pas beaucoup connu mais, tout comme lui, il a la fibre artistique. Heureusement, car il sera exclu successivement du Collège des Jésuites puis de l'Athénée pour indiscipline. Sa mère l'inscrit alors à l'Académie, en 1900, pour qu'il y acquière les bases du métier de peintre-décorateur. Il apprend à imiter les bois et les marbres, mais on ne peut par contre assurer qu'il suivit les cours de peinture de chevalet, car les finances familiales ne l'auraient pas permis.

Sorti de l'école à 20 ans, il est réformé du service militaire pour raisons de santé et travaille comme décorateur, tout en consacrant ses loisirs à la peinture de chevalet, à l'instar de son grand-père Jean-Baptiste. Une dizaine d'années plus tard, c'est la guerre et le travail se fait rare. Il perfectionne son art en gravant à l'eau-forte et en dessinant à la plume des paysages réalisés par son père. Cette étude approfondie lui permet de trouver petit à petit sa voie.

La guerre finie, il est désigné comme professeur de dessin à l'Académie. Plus tard, en 1930, on lui confie également la charge du cours de peinture, ce qui ne l'empêche pas de poursuivre une carrière personnelle et d'exposer régulièrement, mais presque exclusivement à Namur. Entre 1938 et 1941, il constitue un recueil de 166 peintures sur papier représentant différentes vues de Namur et ses environs. Contenant plusieurs copies de réalisations antérieures ainsi que de quelques œuvres de son père, son livre, comme il l'appelait, outre le plaisir qu'il éprouva à le réaliser, lui servit également d'aide-mémoire pour l'exécution de certaines toiles en atelier. Une exposition à la Maison de la Culture et une publication (cfr bibliographie) lui furent consacrés en 1985. En 2000, la Ville acquit plusieurs de ces œuvres sur papier.

Retraité de l'enseignement en 1955 -c'est son élève Luc Perot (Namur, 1922 – 1985) qui lui succède- il commence à réaliser, à partir de 1957, des œuvres de moyen et grand formats qu'il appelle « synthèses ». Il y rassemble en compositions uniques différentes vues de la vie namuroise, comme dans Namur, 3ème dimanche de juillet, acquise par la Ville en 1968. Albert Dandoy s'y est remémoré Namur « vers 1910, dernières années de la Belle Epoque » selon une plaquette en laiton apposée au bas de l'encadrement. On y voit notamment une procession à côté de la foire et, plus en arrière, l'actuelle place d'Armes avec l'ancien Hôtel de Ville incendié en 1914, entre la place St-Aubain, la cathédrale et la citadelle. Topographiquement ce n'est pas juste, mais là n'est pas le but : Dandoy a synthétisé, juxtaposé les souvenirs de ses jeunes années en une seule vue d'ensemble de grand format.

La production d'Albert Dandoy est abondante et il est malaisé, voire impossible d'en dresser le catalogue exhaustif. Il a laissé de nombreuses œuvres de qualité inégale mais parfois supérieure, évoquant majoritairement Namur. Comme Félicien Rops il aimait sa ville natale, mais contrairement à son prédécesseur, elle le lui rendit de son vivant.

Thierry Oger


Sources disponibles à la Bibliothèque communale, venelle des Capucins :

Arts plastiques dans la province de Namur. 1945 – 1900, Bruxelles, Crédit communal, 1991
Le dictionnaire des peintres belges du XIVème siècle à nos jours, Bruxelles, La Renaissance du Livre, 1995
DUPONT, Pierre-Paul : Le livre du peintre Albert Dandoy. 166 vues de Namur (1938 – 1941), Bruxelles, Crédit communal, 1985

 

 

 

 

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