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Les échevins de Namur en 1597 - Jean DE SAIVE (Saive ? 1540 - Namur 1611)

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Le mayeur et les échevins se présentent à nous, désignés par leurs armoiries et leurs noms.

Nous identifions ainsi, de gauche à droite en commençant par le tableau de gauche, les échevins Onin, Villenfaigne et Riflar, seigneur de Rosée, le mayeur de Marbais puis, à droite, les échevins de la Morteawe, Gaiffier, de Wahan dit Baillonville et Henrart.

Une œuvre édifiante

Ces deux panneaux sont en fait les volets intérieurs d'un triptyque dont la partie centrale représentait probablement le Jugement Dernier. « Ce genre de scène forme une catégorie spéciale de représentations qui étaient utilisées comme exemples moraux dans les bâtiments où la justice était rendue. Ces scènes devaient rappeler aux magistrats communaux qu'ils ne devaient pas abuser de leur office et de leur pouvoir, leur rôle étant de rendre des décisions honnêtes et justes, de façon objective. Le thème le plus communément employé, depuis le XVe siècle est le Jugement Dernier. (...) Des exemples de justice humaine, comme la Justice d'Otton, de Salomon, de Cambyse, de Trajan ou d'Herkenbald, étaient également représentés » (Dubois, p.29).

Au verso des portraits figure, peinte en grisaille, l'histoire d'un juge prévaricateur condamné par le roi Aman à être écorché. Il y a, pour le volet gauche, son supplice et, à droite, la restitution de la charge du juge à son fils. Détail macabre, la peau du père est accrochée en arrière-plan, sous un baldaquin, comme pour avertir le nouveau magistrat de ce qui attend les juges malhonnêtes. Le style italianisant de ces deux scènes fait penser à l'influence qu'exerça le Liégeois Lambert Lombard (1505 ou ‘6 – 1566) à son retour d'Italie.

A l'exception de l'échevin Villenfaigne, les édiles sont représentés les mains jointes, comme en prière. Observez bien, certains regardent vers nous. « Durant le XVIe siècle apparaît une modification de certains portraits de donateurs. Comme pour le portrait indépendant, la nouvelle conception développant la relation entre le donateur et le spectateur se fait jour dans le regard que porte le donateur, non plus sur l'objet de sa dévotion, mais sur le spectateur » (id., p.25).

Un cadeau qui rapporte

On sait ce qu'est devenue la partie centrale du triptyque. « Elle fut sauvagement débitée en lattes de plafond pour l'Hôtel de Ville construit en 1828 sous le gouvernement hollandais et incendié en août 1914 » (Courtoy, p.1). Le même auteur nous apprend que les deux volets ont été retrouvés en 1856 dans une caserne, transformés ... en portes d'armoires.
Les archives révèlent que le triptyque a été peint pour décorer le local de réunion du mayeur et des échevins (« la chambre eschevinale ») mais aussi que le peintre, Jean de Saive, l'a réalisé entièrement à ses frais. En remerciement, lui et son épouse furent exemptés d'impôts à vie.

Une dynastie de peintres

Mais qui était Jean de Saive, aussi connu sous le nom de Le Saive, Le Save ou encore de Save ? Ce peintre de scènes de genre, portraitiste et armoriste, est né à Saive, près de Liège, vers 1540.Sa jeunesse ainsi que sa formation professionelle sont inconnues. On trouve un premier témoignage de lui en 1562, lors de son admission à la bourgeoisie de Namur.

En 1585, il est à Bruxelles, comme attaché à la Cour d'Alexandre Farnèse, Prince de Parme, Gouverneur des Pays-Bas, en tant que « peintre attitré et concierge des vignobles ». Le portrait en pied qu'il réalisa du prince est conservé à la Pinacothèque de Parme. Avec ces deux volets de triptyque, ce sont les seuls tableaux attestés que l'on connaisse de lui à ce jour. Il réalisa néanmoins d'autres œuvres puisqu'en 1594, il vendit à l'Archiduc Ernest des peintures représentant un marché et les six saisons (on divisait alors l'année en autant de parties). Le document de 1597 le levant de tout impôt évoque « l'art et la dextérité » des peintures qu'il avait réalisées pour Don Juan, le Prince de Parme et le Gouverneur de Berlaymont. Entretemps, il a renoncé à sa charge à Bruxelles et est revenu à Namur. Son nom réapparaît dans les comptes de la Ville en 1591.

Marié à Jeanne de Carlemont, il eut plusieurs enfants. Sa fille Anne, née en 1569, eut un fils peintre, Jean de La Bouverie, dit le Vieux, né avant 1614 et décédé en 1655. Son fils Jean-François, dit Jean de La Bouverie le Jeune, fut peintre lui aussi et est cité comme « bourgeois peintre en la ville de Bruxelles » en 1686. On a souvent confondu l'œuvre du père et du fils.

Le deuxième enfant de Jean de Saive, Jean de Saive le Jeune, né à Namur en 1571, fut aussi peintre. Il s'établit à Malines où il décéda en 1624. Son fils Jean-Baptiste, né dans la même ville en 1608, fut peintre lui aussi et disparut après 1641. Enfin le troisième enfant de Jean de Saive, François, fut peintre à son tour et reçu franc-maître à Anvers en 1599. A l'instar des La Bouverie, on a plus d'une fois confondu les œuvres des différents de Saive.

Thierry Oger
(Photos : IRPA , Bruxelles)

Bibliographie :

COURTOY, F. : Le peintre Jean de Saive, dans Namurcum, 1958, n°1
DUBOIS, A. : L'art du portrait dans le Namurois aux XVème et XVIème siècles, dans Portrait en Namurois, Namur, Société archéologique de Namur-Province de Namur, 2002
DUPONT, P.-P. : L'apport namurois dans De Roger de le Pasture à Paul Delvaux. Cinq siècles de peinture en Wallonie, par STIENNON, J., DUCHESNE, J.P. et RANDAXH, Y., Bruxelles, Lefebvre et Gillet, 1988
Dictionnaire des peintres belges, du XIVème siècle à nos jours, Bruxelles, La Renaissance du Livre, 1995

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